« Promethea » : Bienvenue dans le monde fictif

On a tout traversé. Les grands récits ont été pervertis ou se sont avérés des arnaques nous menant droit vers l'hécatombe. Ne reste plus que celui néolibéral, ânonnant que l'Histoire est finie, et que le capitalisme tardif sera désormais le seul ordre qui prévaudra pour le restant de l'éternité. Quelques factions terroristes s'excitent de-ci de-là ? On lâche la CIA sur leur pays. Les gens rêvent d'autres choses ? On les calme avec de l'imaginaire frelaté, aseptisé, à grands coups de phase trente-douze du MCU. Toute envie d'héroïsme, d'amélioration du monde, ou même de sérieux, est immédiatement ringardisée, tournée en ridicule, l'ironie et le sarcasme semblant désormais les seuls moyens d'envisager le monde. 2024 est une année Rick & Morty : une de plus marquée par le nihilisme. Place à un 1999 alternatif imaginé par Alan Moore. Eux aussi ont tout traversé. Plus rien ne fait rêver personne. Il y a des voitures volantes et des ovnis, mais personne pour s'en étonner. Les superhéros font leur job sans grand charisme et la foule semble se contenter de les suivre vaguement leur taf. Les chanteurs qui cartonnent sont ceux qui tournent en ridicule leur petite vie minable, on aime se moquer d'une mascotte comme le Gorille qui Pleurniche sans pouvoir s'empêcher de s'atermoier avec elle. Alors, qu'est-ce qu'on fait dans ces cas-là ? On repart de zéro et on se remet à vénérer des superslips apparaissant constamment comme des hommes providentiels ? Non, on est pas dans Doomsday Clock, on est des gens sérieux, ici. On met en place des nouveaux héros. Qui fument. Qui jurent. Qui foirent, parfois. Mais qui ont l'espérance. Et qui font leur job.

Clermont 2024 : Comment ça s’est (vachement bien) passé

Allez, Sylvain, secoue-toi les puces. Ça fait dix jours que le nouveau festival du court-métrage de Clermont-Ferrand est fini, les gens attendent ton article de grand reporter avec la dernière impatience. Ou au moins l’avant-dernière. Bon, je suis sûr qu’il y aura au moins un lecteur qui préférera regarder ça que les pubs de Cyril Hanouna. Ton blog est une start-up disruptive pleine d’avenir. Je suis sûr qu’il peut encore tenir trois jours. Et dans le pire des cas, au moins tu auras proposé quelques chouettes films.

« Métamorphoses » : Les Terres Obscures

Un jour, en essayant de ne pas y laisser ma santé mentale (déjà bien entamée par mes vacances à R'leyh, qu'on m'avait pourtant vantée comme un lieu particulièrement pittoresque et authentique), il faudra bien que je vous parle de l'œuvre maîtresse de François Schuitten, Les cités obscures. Scénarisée par son compère Benoît Peeters, cette fresque culte de bandes dessinées possède une quinzaine d'albums parfois expérimentaux, sans compter les nombreux hors-série aux formats variés (dont certains sont de temps en temps comptés comme faisant partie de la série), CD, films en direct-to-DVD et sites plus ou moins officiels. Les cités obscures, c'est un rabbit hole, lui-même contenu dans un autre plus grand : toutes les autres œuvres rétrofuturistes d'un dessinateur sortant des sentiers mille fois rebattus du steampunk / dieselpunk / eccétérapunk, pour déployer une imagination singulière avec pourtant une vague impression de familiarité. Prenez Les Terres creuses, par exemple : c'est encore plus jusqu'au-boutiste dans le surréalisme. Mais il faudrait encore compter Revoir Paris, Aquarica, et surtout Métamorphoses, qui nous a été rééditée il n'y a pas si longtemps en intégrale avec en bonus entre les deux tomes une histoire plus courte qui n'était sortie jusqu'ici qu'en portfolio. Et ça tombe bien, car cette série est une bonne porte d'entrée pour le reste de son travail : déjà parce qu'elle est assez courte, ensuite parce qu'elle est une sorte de chaînon manquant entre les récits de mondes démesurés et absurdes des Terres creuses et ceux à échelle plus humaine, propices à la satire et à l'inquiétante étrangeté, des Cités obscures.

« Les Tambours du Dieu Noir » : Merci, al-Jahiz… pour ces deux superbes ouvrages

En bon anarcho-wokiste tirant en cachette les ficelles de Disney, j'ai remarqué que mon blog ne contenait pas assez d'auteurs racisés (ne parlons même pas des autrices). C'est d'autant plus dommageable qu'ils parlent bien souvent dans leurs textes de leurs cultures, ce qui serait l'idéal pour quelqu'un comme moi en ayant ras la casquette de la SFFF et du cinéma occidentalo-centrés (à base de transhumanistes s'extasiant devant le dernier pet d'Elon Musk et de chevaliers pourfendant tellement d'orques et de dragons qu'ils sont à deux points de monter un syndicat).  Essayons de réparer ça.

TUGPÉUA #34 Spécial Une Heure-Lumière

Quand je ne suis pas occupé à rattraper un classique cultissime déjà lu de tout le monde avant moi où à déterrer des productions tchécoslovaques mineures du fin fond des années 60, il m'arrive de m'intéresser à la rentrée littéraire. Attendez, la rentrée littéraire, ce concept archaïque consistant à produire le plus possible de livres que personne n'aura jamais le temps de lire, quitte à cravacher auteurs et autrices et bâcler leur accompagnement dans l'univers impitoyable du monde de l'édition ? Oui, mais pas n'importe quelle rentrée littéraire : la rentrée littéraire SF, et chez une maison experte, s'il vous plaît. Les deux titres de l'excellente collection Une Heure-Lumière paraissant à cette occasion m'avaient interpellé, et j'en ai profité pour rattraper quelques autres titres qui m'intéressaient à des degrés divers. Comme il s'agit de livres déjà très partagés sur la blogosphère, on va pas tailler éternellement le bout de gras dessus ; c'est donc parti pour un ensemble de critiques-éclairs.

« The Rising of the Shield Hero » : La fantasy bidon-de-lessive

Allez-y ! Fouettez-moi la plante des pieds avec des orties ! Pendez-moi par les tétons ! Emmenez-moi au festival de l'Alpe d'Huez ! Oui, j'essaye régulièrement d'éviter le sujet sur mon blog, mais aujourd'hui il est temps de le dire ouvertement : Je n'aime pas les mangas. Alors apparemment c'est un sacrilège dans les milieux geeks / nerds, mais l'écrasante majorité d'entre eux (sauf dans le domaine des seinen) me semble ne pas avoir sous le capot grand-chose d'autre à proposer que des bastons (il est vrai souvent fort réussies) et des situations à l'eau de rose en terme de dramaturgie, de finesse des dialogues, de réflexions politiques ou philosophiques, sans compter qu'il faut attendre 50 tomes avant de voir l'évolution d'un personnage. Généralement, je la mets en veilleuse (...). Sauf lorsque je peux me lâcher sur des bouquins comme celui qu'on m'a offert il y a quelques jours, car là je sais qu'il y a précisément tout ce que je déteste dans les mangas et la fiction en général.

« A Clash of Kings » : PARCE QUE C’EST NOOOTRE COUROOOOONNE !

Game of Thrones m'aura hanté toute ma vie, empêché de devenir l'écrivain de fantasy de génie que j'ai toujours été. À 14 ans, en bon Jean-Kevin Kikoolol, je m'inscris sur Wattpad et commence à publier une histoire sur un lutin appelé Tyrioc (sic). Mince, ça existe déjà. À peu près à la première époque, j'écris la première version restée inachevée du vaste projet sur lequel je travaille aujourd'hui dans le cadre de mon mémoire de recherche-création, une vaste étendue sauvage peuplée par des créatures ancestrales et surnaturelles nommées les Enfants de la Forêt. Mince, ça existe déjà. Bon, à part ça, mon autre grand projet épique, ça parle d'un Vieux Monde, c'est bon, c'est pas dans Game of Thrones, ça ? Non, ouf. Par contre, c'est dans un petit jeu de rôles et de figurines peu prisé par les antimilitaristes... Bôh, ça doit être sans grande importance.

« El Topo » : Ta gueule, c’est artistique

Le blog étant en baisse d'audience, c'est le moment de faire le polémiste sulfureux contre la bien-pensance du politiquement correct : El Topo, c'est vraiment pas très bien. Bon, en vrai il y a énormément de trucs cools, mais ça reste un film qui m'est clairement resté en travers de la gorge alors que j'y repense encore des mois après. Le long-métrage culte d'Alejandro Jodorowsky, un des premiers midnight movies, aurait pu se retrouver parmi les chefs-d'œuvre encensés sur ce blog, mais se retrouve malheureusement parasité par un sous-texte qui le fait passer de la case "vu et approuvé" à un vulgaire délire mystique pour mascu forcené.

« A Game of Thrones » : Allez tous vous faire floculer !

Votre serviteur est un faquin. Tandis qu'il s'extasiait sur Babelio d'un énième hors-série de "La Guerre des Clans" ("Le destin de Feuille de Sanglier", celui où on découvre comment Aile de Saucisson s'est tordu une griffe), le monde continuait de tourner et il aurait mieux fait de rattraper les innombrables classiques de la fantasy qui lui manquent. Et parmi tous ceux-là, il en est un en particulier qui a défrayé la chronique, dont les livres comme la série adaptée ont embrasé les imaginaires, un nouveau rempart de la pop-culture au point que même les incultes de la presse mainstream se sont mis à dire "Une œuvre digne de Martin" au lieu d'"une œuvre digne de Tolkien" pour désigner le gagne-pain des tâcherons du genre qu'ils daignent lire de temps à autres : cette œuvre, c'est Le trône de fer, vaste cycle qui restera selon toute vraisemblance à jamais inachevé, mais qui forme une sorte de synthèse de tout ce qu'a inventé la fantasy adulte post-Tolkien.

« Harry Potter et l’enfant maudit » : Mais quelle connasse, cette J. K. Rowling

Il y a quelque chose de pourri au royaume de la Magie. Déjà, on trouvait dans les sept romans d'Harry Potter quelques éléments douteux dans le message dont on parlera prochainement dans un article que j'ai presque achevé ; puis il y a eu les fameuses polémiques à la con déclenchées par l'autrice (c'est vrai, quoi, nous on défend la tolérance, contrairement aux trans) ; puis la saga des Animaux Fantastiques et son fameux méchant Grindelwald (c'est vrai, quoi, nous on défend la tolérance, contrairement aux révolutionnaires) ; puis le jeu vidéo Hogwart's Legacy (c'est vrai, quoi, nous on défend la tolérance, contrairement aux jui... attendez une seconde). Bref, J. K. Rowling ne semble plus savoir faire autre chose que de recycler à toutes les sauces son Wizarding World : alors, OK, ça semble écolo, mais ça réduit pas mal l'écosystème de la pop-culture de ses fans ; ça et recracher ses positions réactionnaires, alors qu'Harry Potter avait le potentiel pour devenir un héros antifa. Et puis roulements de tambour, arrive cette huitième histoire d'Harry Potter, une pièce de théâtre servant d'épilogue aux romans qui lui ont précédée. Une initiative dézinguée par les fans, qui, si je ne l'ai pas détestée, me laisse une nette impression mi-figue mi-raisin.